J’aime les tableaux de portraits de femme. Dans la vie, jamais une femme ne te regarde ainsi, pendant des heures, droit dans les yeux. Ou alors c’est une statue de la Vierge Marie. Devant ce genre de tableau, tu en prends plein la gueule pour pas un rond et, finalement, tu ne soutiens pas le regard, c’est toujours toi qui pars, fuyant exaspéré ou peureux. Que veut-elle me dire la « Berthe Morisot au bouquet de violettes , » d’Édouard Manet ? Je ne lui ai rien fait, moi, elle ne me connait même pas, je passais par là par hasard, feuilletant des images d’art à l’écran quand, tout à coup, j’ai senti ce drôle de regard qui me fixait d’un air tranquille et insistant, interrogatif et moqueur. En fait, on dirait qu’elle louche, la Berthe ! Cette jeune femme en noir avec une coiffe à la va-comme-j’te-pousse m’a scotché et je n’ai su quoi lui répondre. J’aurais pu au moins lui déclamer en quelques vers mon envoûtement par l’image de femme rebelle, libérée, intrigante qu’elle don...