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Pauvre patron écartelé!

[chronique de Lucien à paraître dans 01 DSI n° 27]
« Nos patrons sont-ils à la hauteur ? » : ce n’est pas moi qui pose la question, jamais je n’oserai, vous pensez, avec tous ces boss qui traînent dans les couloirs et qui parfois lisent un journal. Non, c’est le très sérieux mensuel économique Enjeux – les Echos qui s’interroge ainsi. Il se demande si, aujourd’hui en France, ce ne sont pas les salariés qui font les frais du « capitalisme financier mondial ». Sacrilège ! Et panique dans les conseils d’administration : plus moyen de s’interjeter en douce ses jetons de présence, plus moyen de se diviser entre soi ses gras dividendes. Mais quel est ce monde où l’on ne peut plus s’enrichir sereinement sur le dos des autres, sans que les médias n’en fassent tout un ramdam? « L’argent ne fait pas le bonheur des pauvres » disait pourtant Coluche, qui avait tout compris.


« Il suivait son idée. C'était une idée fixe et il était surpris de ne pas avancer »
Jacques Prévert
Il faut plaindre ce boss écartelé. C’est tout azimut qu’il doit rendre des comptes, au sens propre comme au sens figuré: aux actionnaires, aux médias, aux salariés, aux syndicats. Shiva du profit warning à la langue de bois, le patron ne peut plus patronner ni plastronner tranquille. Les « fonds » le surveillent, du fond de leurs abysses dorées de super-actionnaires. Ces fonds quasi-aveugles, qui ne savent lire qu’une ligne sur un bilan : celle du bas, qu’on appelle « bottom line » en anglais, ce qui ne veut pas dire « la ligne du derrière »…
Les fonds parlent avec des mots bizarres, par exemple, ils ne vous disent pas : « Bonjour, comment ça va ? » mais « Ebitda, comment il va ? » Ebitda ? Vous savez bien, c’est le résultat avant frais financiers, impôts, provisions et amortissements. Une fois qu'on a enlevé tout ce qui fâche, votre résultat est forcément positif. Ou alors vous êtes vraiment nul. C’est un ratio génial : il permet à un groupe de faire croire aux analystes qu'il fait des bénéfices alors qu'il est en fait bourré de dettes, compte tenu de ses investissements aléatoires. Ce fut la grande spécialité de Jean-Marie Messier. Dans les rencontres d'affaires, il est de bon ton d'aborder un confrère en lui demandant : « Et toi, ton Ebitda, il mesure combien ? » S'il vous gifle, c'est qu'il a mal compris. Une entreprise qui a un mauvais Ebitda est d'abord dépitée, puis décapitée.
Plus vous êtes dans la technologie – cet univers étrange où la visibilité est nulle et la conjoncture incertaine - plus votre business est aléatoire et plus les fonds sont agités : ce n’est pas un tsunami, c’est plutôt une brise permanente qui frise leurs sourcils et leurs calculettes. Vous devez alors prononcer les mots qui rassurent : « recentrage » (une seule idée à la fois), « synergie » (plus doux que «suppression d’effectifs »), « rationalisation » (moins brutal que « réduction des coûts »). Et, comme tous vos camarades patrons confrontés aux mêmes dilemmes, vous lancez à vos troupes apeurées cet impérissable slogan de la modernité : « Grâce à vos efforts (ne dites pas « gel des salaires »), nous allons faire mieux avec moins. » Allez, bonne chance !

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